Huile sur toile
92 x 73cm
Ni signé ni daté
2022.3.001
© Musée de Port-Royal
Les Actes des apôtres décrivent la communauté des premiers Chrétiens de Jérusalem, dans laquelle les biens étaient mis en commun. Mais Ananie et sa femme Saphire gardèrent une partie du produit de la vente d'une propriété, en déclarant qu'ils remettaient la somme totale à la communauté. Ils moururent au pieds de saint Pierre, foudroyés par la colère divine pour avoir mentis (Actes, V : 7-10).
La commande des Mays de Saint-Germain s’inscrit dans un vaste projet de rénovation de l’église abbatiale et d’un réaménagement du sanctuaire commencé vers 1690.Elle est liée à la personnalité de Dom Jacques Bouillard, chargé dès 1696 des travaux d’embellissements de l’église et nommé sacristain à partir de 1705. Il avait commandé dès 1696 à Claude-Guy Hallé deux cycles de peintures pour le chœur (vie de saint Germain ; vie de saint Vincent) jamais réalisés. Pour orner la nef, il commanda dix tableaux à neufs peintres sur des sujets tirés des Actes des Apôtres. Il passa lui-même les marchés et exigea des artistes des répliques de petits formats pour les faire mettre dans la nouvelles sacristie, achevée en 1717. Cette version est l’esquisse pour le may de Saint-Germain-des-Prés de 1718 commandé par Dom Bouillard à Sébastien II Leclerc.
La communauté revendiqua dès l’origine la filiation avec les anciens Mays de Notre-Dame, dont le dernier avait été commandé dix ans plus tôt en 1707 et dont les sujets étaient également tirés des Actes des apôtres. L’exposition des tableaux s’accompagnait d’un livret comportant de courts poèmes à l’adresse du Régent, Philippe d’Orléans, constituant de véritables plaidoyers en faveur des Jansénistes et l’occasion d’une discrète propagande en faveur de l’Appel. Dans un langage codé cher aux jansénistes du début du XVIIIe siècle, les épisodes choisis dans les Actes n’étaient que les reflets des événements contemporains : Paul et Barnabé refusant d’adorer les idoles de Joseph Christophe, et Saint Paul à Lystre, chantant des hymnes au fond de sa prison de Guy-Claude Hallé, sont exposés l’année de l’appel de 29 moines contre la bulle Unigenitus et leur exil à l’abbaye de Saint-Denis ;le cycle de 1718, traitant du refus des vanités terrestres, cher aux écrivains de Port-Royal, est livré l’année où une grande partie de la Communauté renouvelle son appel au Concile contre la bulle. Il en va de même avec les deux tableaux de 1719 représentant la double cécité du magicien Elymas (Lemoine) et de saint Paul sur le chemin de Damas (Restout) ; le cycle de 1720, une double scène de résurrection, est livré l’année de l’élection de Dom Denis de Sainte-Marthe, issus d’une famille proche de Port-Royal.
© Musée de Port-Royal des Champs
Commandé par Dom Jacques Bouillard à Sébastien II Leclerc ; Acquis par l'Etat auprès de la Galerie Franck Baulme en 2022 ; commission du 5 mai 2022.
Christine GOUZI, Jean Restout (1692-1768),peintre d'histoire à Paris, Paris, Arthena, 2000, p. 27.
Christine GOUZI, L’Art et le jansénisme au XVIIIe siècle, Paris, Nolin, 2007(réimpr. Paris, Classiques Garnier, coll. "Univers Port-Royal", 2021).